premier fest-deiz sauvage : Rennes, 26 mars 2011

La culture bretonne est pleine de richesses qui, comme nombre d'éléments patrimoniaux de valeur, cherchent parfois à se transmettre via des canaux cohérents avec la société contemporaine. Parmi ces richesses, il y a ce formidable vecteur de convivialité, d'échange et de mixité qu'est la musique à danser. La richesse humaine que l'on retire de ces moments partagés dépasse de beaucoup la simple démarche d'aller écouter de la musique ou d'aller danser, mais encore faut-il l'avoir éprouvé (et dans un contexte favorable) pour en prendre conscience. Or, si beaucoup de groupes cherchent à s'approprier ce répertoire et cette approche d'une façon "moderne" (quitte à se tromper sur ce que peut signifier être moderne pour une musique qui a par ailleurs la chance d'avoir peu à voir avec cette notion bancale de modernité), il n'empêche qu'en dehors du cadre pourtant récent du fest-noz (ou du fest-deiz), cet espace reste enclavé dans le monde des gens qui s'intéressent déjà un peu à tout ça, ou s'y montrent ouverts, ou sont "initiés" par des tiers. Une des manières à mon sens pertinentes d'aller sortir ces moments là de leur contexte cloisonné et de proposer à tout un chacun d'en aborder, voire d'en partager tout ce qu'ils ont à offrir, est de les emmener dans un lieu et à un moment opportuns. Pour interpeller (ou pas) d'une manière légère et généreuse des gens qui sinon n'y auraient jamais porté la moindre attention.

D'où le fest-deiz sauvage.

L'idée est simple : aller proposer un espace de fest-deiz ouvert dans un lieu urbain ouvert, à la disposition des passants, pour écouter, voir, pourquoi pas venir danser.

Les ingrédients :

- un commando de quelques danseurs (connaissant les danses et désireux de les partager plutôt que de juste en faire la démonstration), si possible de jeunes (ou moins jeunes) fous sympathiques et souriants...

- des musiciens se connaissant et ayant déjà leurs habitudes, afin d'avoir un répertoire "prêt à l'emploi".

Ensuite, c'est bien simple, on débarque sur une place (de la mairie, du marché, de l'église...), un square, une gare, on s'installe en 2 mn et hop, les musiciens jouent, les danseurs dansent. Les passants passent, s'arrêtent ou pas, écoutent ou pas, viennt danser ou pas, mais en tout cas approchent ce qu'est la musique bretonne à danser, sans rien avoir demandé à personne mais sans subir non plus quoi que ce soit vraiment. On joue 3/4 d'heure environ, éventuellement un peu plus, et basta, on remballe et on s'en va (quitte à recommencer ailleurs, parce qu'on est des malades). Pas de blabla, des écriteaux "attention zone de fest-deiz sauvage" pour éventuellement expliquer en deux ou trois lignes la démarche, pas d'étui de guitare pour récolter des sous, pas de cd à vendre, on propose un échange, on s'amuse au pire entre nous et c'est tout.

La première de ce genre de choses (en tout cas pour les gens que je connais) a eu lieu samedi dernier à Rennes, place Sainte-Anne, avec une bonne douzaine de danseurs et trois musiciens. C'était à l'arrache, le répertoire avait été préparé en très peu de temps, mais l'ambiance a carrément fonctionné, beaucoup de plaisir simple pour les participants, pas mal de gens à s'intéresser, s'arrêter, écouter, et même quelques uns à venir danser. Un violoniste anonyme qui nous rejoint pour un morceau sur le chemin de son rendez-vous de coiffeur. Des chanteuses motivées, auxquels les danseurs répondaient, des choses approximatives mais conviviales qui ont pleinement répondu à nos objectifs modestes mais ambitieux. De quoi se donner envie de recommencer, moins à l'arrache au niveau préparation musicale, avec d'autres groupes, d'auteres chanteurs. En annonçant un peu avant le prochain événement sur les réseaux sociaux, par mailing list ou via tamm-kreiz.com. On verra. Mais le plaisir était là. Le soleil aussi, ça aide.