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la tanière du hérisson
21 mai 2006

Christophe De Pontfilly est mort

christophe_de_pontfilly
    Ce journaliste, connu et reconnu notamment pour son travail consacré à l'Afghanistan et au commandant Massoud, vient de mourir à l'âge de 55 ans. Fondateur de l'agence de presse Interscoop, auteur de nombreux livres et documentaires sur un pays qu'il n'a jamais cessé d'aimer, d'arpenter et de questionner, il avait été un des premiers journalistes avec Jérôme Bony à entrer clandestinement dans l'Afghanistan envahi par l'URSS, en 1980. Son travail, reconnu par de nombreux prix comme le prix Albert Londres, avait connu un bel engouement lors de la diffusion du film, beau et amer, Massoud l'Afghan. Affecté par l'assassinat de ce personnage ami dont il avait suivi le parcours depuis ses débuts dans la résistance aux soviétiques puis aux taliban, il avait fréquemment mis au jour l'attitude lamentable de l'Occident, plus prompt à pactiser, financer ou s'accommoder des extrémistes de tous bords qu'à ce combattant libre et honnête, qui aurait pu ioffrir un pont pertinent entre l'Afghanistan traditionnel et le monde moderne.
    Christophe de Pontfilly venait de finir son premier long métrage, L'étoile du soldat, tiré de son roman inspiré d'un histoire vraie, celle d'un soldat soviétique capturé par les Afghans, avec qui il avait fraternisé, puis tué par les Pakistanais, dont l'ingérence en Afghanistan ne sera jamais assez dénoncée. Un autre témoin tombe.

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Commentaires
C
bonsoir, j'apprends la disparition de C.deP. Respect, merci et souvenir. Il nous a fait connaître Massoud. Avoir été l'ami d'un tel homme suffit à le situer. Rien à ajouter.<br /> Condoléances à ses proches, merci encore à lui
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J
Sur la route, toute à l'heure, j'ai appris le déces de Christophe. C'est un autre reporter, Jean Rollin qui en a parlé discrètement ce midi sur france inter...<br /> Mème si je n'ai jamais rencontré Christophe, son film sur Massoud m'avait suffisemment touché pour que je puisse me sentir proche de lui au point de l'appeller par son prénom... <br /> Je me sens triste, d'autant plus que son départ n'a vraisemblablement pas été bcp relayé par les médias... Qui reste t-il donc en afganhistan pour parler de cette situation ? Albert Londres doit danser la jigue la où il repose, puisque visiblement certaines gouailleuses du Monde oublient bien vite les valeurs du journalisme(je viens de l'apprendre, merci francoise).<br /> Alors a ma façon, lors de mon travail au contact des jeunes d'aujourdhui (au pays des festounoz)je tacherai de ne pas baisser les bras...<br /> merci à vous...
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H
Merci de ton message, Françoise, qui que tu sois, ça fait du bien de lire des choses simples et résolues comme ça. Des gens qui oeuvrent dans le bon sens et voient les choses comme elles sont. Merci, donc.
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F
oui, nous sommes malheureux, tristes. Mais il sera toujours là, et à quelques-uns nous ne baisserons pas les bras. Et on ira la-bas. Vive l'humour décalé.<br /> Il faut croire malgré tout en l'humain et surtout témoigner<br /> fvm
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H
Je me permets de reprendre des extraits de l'hommage rédigé par Fraçoise Causse, journaliste, au disparu.<br /> "[...] Celui qui aura grandement participé à faire connaître Ahmad Shah Massoud aux Français a rejoint son ami, là où reposent les honnêtes gens.<br /> <br /> A l’heure où, sur certains sites consacrés à l’Afghanistan, on voit resurgir des messages d’Afghans qui préfèrent oublier que, sans Massoud, leur pays serait encore sous le joug des taliban, celui qui avait participé à faire connaître Le Lion du Panshir a décidé de jeter l’éponge.<br /> <br /> Ils allaient bon train ces derniers temps, les messages haineux à l’encontre de la seule personnalité politique afghane qui aurait été à même de mener son pays sur le chemin d’une vraie démocratie. Avec aplomb, leurs auteurs se livraient, par le biais des forums, à une danse macabre sur la dépouille d’un homme assassiné le 9 septembre 2001. Le reste de mauvaise conscience qu’ils éprouvaient à se ranger dans le camp des taliban plutôt que dans celui de la résistance se trouvait balayée en attribuant à Massoud des crimes dont il n’était pas l’auteur, des ambitions qui n’étaient pas les siennes, le réduisant à un chef de guerre comparable à Sayaff ou à Gulbuddin Hekmatyar, deux assassins, des vrais ceux-là, respectivement valet des services secrets de l’Arabie saoudite et du Pakistan. Massoud n’était le valet de personne, voilà qui était bien emmerdant !<br /> <br /> Ceux qui crachaient sur Massoud s’empressaient d’y associer Ponfilly, sans jamais le nommer (quand on est lâche, on l’est jusqu’au bout). [...]<br /> <br /> Ponfilly n’était pas un esprit bien-pensant, c’était un homme honnête. Un grand reporter qui avait mis l’humain au cœur de son métier, et qui n’hésitait pas à s’insurger quand des confrères préféraient répercuter la propagande initiée par les services secrets pakistanais et qui servait si bien les intérêts de la politique menée par le Quai d’Orsay, plutôt que de dire la réalité du terrain, la réalité tout court.<br /> <br /> La correspondante du Monde en poste à Islamabad peut se réjouir aujourd’hui, elle ne recevra plus de courrier rageur de celui qui reçut le Prix Albert Londres. Elle qui répond toujours qu’elle n’a de leçon de journalisme à recevoir de personne mais qui s’est toujours trouvée, en bon serviteur de la République française, à « justifier » des politiques menées dans l’ombre avec des articles complaisants, pourra enfin le faire sans jamais plus être interpellée. [...]<br /> <br /> Christophe, de simple confrère, était devenu un ami. En 1999, j’étais allée l’interviewer après la sortie de Massoud l’Afghan. « Etes-vous déjà allée en Afghanistan », m’avait-il demandé. « Jamais », lui avais-je confié. Et dès lors, il était devenu essentiel pour moi d’aller à la rencontre de cette résistance qui de toute apparence était admirable mais dont il me fallait vérifier la réalité tant tout cela semblait trop beau pour être vrai.<br /> <br /> J’irai finalement au cours de l’été 2000 dans la vallée du Panshir. J’y rencontrerai Massoud tandis que les taliban venaient de lancer une offensive majeure. Et je dus bien admettre que le film de Christophe était fidèle en tous points à la personnalité du commandant du Front uni et de l’âme de ces Afghans du Panshir, résistant dans le plus grand dénuement, mais avec quelle dignité… et un humour à toute épreuve.<br /> Il n’y avait rien à changer à « Massoud l’Afghan » pour être juste. C’est un film touché par l’état de grâce. Un film honnête sur d’honnêtes gens. Cela, les téléspectateurs français l’avaient compris. Et Massoud devint populaire en France, auprès des petites gens qui se passaient de la lecture du Monde, grand bien leur fasse, puisqu’ils étaient mieux informés ainsi – ce qui peut paraître paradoxal. Massoud était aimé des Français, mais la diplomatie française lui avait préféré les taliban, mis en place par le Pakistan, quatrième client en armement de la France.<br /> <br /> Il fallait se battre, en France, à cette époque, pour diffuser des informations sur la résistance afghane quand le Quai d’Orsay, lui, faisait du lobbying sur la scène internationale et des pressions auprès des médias pour obtenir la reconnaissance officielle du régime obscurantiste de Kaboul.<br /> <br /> Il était de bon ton alors, de ridiculiser les journalistes qui faisaient honnêtement leur boulot (voire quelques politiques, tels le général Morillon, Nicole Fontaine et Brice Lalonde), en les faisant passer pour des militants romantiques, béats et naïfs, et Christophe sera en première ligne.[...]<br /> <br /> Le 9 septembre 2001, le problème Massoud était résolu. La souveraineté de l’Afghanistan était reportée à une date ultérieure, le Pakistan et ses alliés y veilleraient. [...]<br /> <br /> Le maillage des militants, français et afghans, qui avaient soutenu le combat de Massoud se relâcha alors peu à peu.<br /> Cependant, demeurait Christophe, ultime point de repère tangible. Témoin et donc mémoire incontestable d’une page d’histoire qui avait bien existé.<br /> Aujourd’hui, nous voilà définitivement seuls. Les révisionnistes qui n’ont jamais abandonné le terrain de la désinformation ont désormais une autoroute devant eux.<br /> <br /> Résonne encore sa voix, calme et inimitable, et cette interrogation glissée en commentaire d’un passage de Massoud l’Afghan : « Dans le tumulte d’images et de sons du monde moderne, tenir une caméra a-t-il encore un sens ? »<br /> <br /> Cette quête de sens, qui l’a harcelé durant sa carrière, aura peut-être eu raison de lui.<br /> Une chose est sûre, sans toi pour tenir la caméra, cela aura définitivement moins de sens.<br /> Et nous sommes malheureux. Le sais-tu ?<br /> <br /> Françoise Causse<br /> <br /> Auteur de « Quand la France préférait les taliban – Massoud in memoriam », publié aux Editions de Paris – Max Chaleil.
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