Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
la tanière du hérisson
21 juillet 2009

Etre végétarien et heureux à la fois, pas si compliqué (1/2)

cochon

Il y a une dizaine d'années, on voyait fleurir (en mode photocopie noir et blanc) cette affiche sur les murs, les poteaux et les recoins urbains de Saint-Brieuc ou Rennes. Je me souviens avoir entendu des commentaires un peu outrés, et m'être dit avec un sourire qu'après-tout, c'était le but de l'opération, sans doute un peu. Alors que ça ne faisait que renvoyer à quelque chose d'assez légitime. Et que ça ne choquait que les gens qui ne voulaient pas réaliser ce qu'était la viande, tout en le sachant complètement.
Depuis, je me suis souvent interrogé sur l'image que véhiculaient les végétariens en général. Et à quel point comme pour tout choix de vie minoritaire et donc jugé "radical", cela pouvait conditionner les passerelles entre végétariens et "viandards". Et là, on rejoint forcément la grande disparité de ce qui compose le vocable très général de "végétarien". Pour avoir participé à nombre de pique-nique, repas, réunions conviviales entre végétariens, j'ai pu prendre la mesure de la diversité des parcours. Certains ont arrêté de manger de la viande par dégout, d'autres par un dégout fondé sur une intuition éthique, d'autres purement par principe. Cela peut être un choix purement alimentaire, voire diététique, ou aller vers un vrai choix de vie, qui englobe bien plus que le simple panier de courses.
De même, je comprends parfaitement que certains apprécient de se retrouver entre eux, tellement la pression sociale et le manque de compréhension de tout ce qui fonde ce choix de vie sont pesants au quotidien. Se retrouver avec des gens qui ne te posent pas les sempiternelles questions sur les carences supposées, ou ne te renvoient pas l'image du mangeur de légume bouilli effarouché par un steak saignant, des fois ça soulage. Et c'est une occasion de partage, de valeurs, de recettes aussi, autour de ce qui est devenu une culture a part entière dans les sociétés occidentales. Du coup, certains ne cherchent absolument pas à s'ouvrir sur la société, à maintenir ce que j'appelais les passerelles vers les non-végétariens, et recherchent le confort du communautarisme, comme nombre de minorités à qui, du reste, on n'a pas fait de place pleine et entière auparavant.
Quand on cherche des blogs ou des sites végétariens sur le web, on a affaire au même foisonnement et à la même diversité. On a des sites très conviviaux, pas militants autrement que par la proposition de recettes festives, originales, simples, qui démystifient le végétarisme et en font quelque chose d'abordable, voire de désirable. Mais aussi des sites crispés dans le rejet absolu de la viande, avec des termes très durs, des comparaisons extrèmes et souvent de nature à desservir la cause (comparaison avec les camps de concentration, par exemple), à culpabiliser ou juger sans arrêt, à montrer des images choquantes. On a aussi des sites de partage qui font part d'expériences, de conversations, de vécus en société. Des blogs militants plus informatifs et pleins d'initiatives. Bref, une vaste toile d'expériences, de moyens d'expressions. Et pourtant, l'image du végétarisme ne change pas tant que ça au sein de la société, je trouve.
Les médias continuent à véhiculer l'image d'un choix radical, alors que ce n'est pas vrai. Sans même donner dans la moquerie facile ou le regard narquois, il s'agit souvent d'articles ou de reportages qui laissent entendre que c'est un choix entier et marginalisant, alors que ce n'est pas forcément le cas. Il y a plein de manières d'être végétarien. C'est tout sauf excluant, en soi (après ce qui peut l'être, en revanche, c'est la place que l'environnement fait à ce choix) et on ne peut pas s'empêcher de regretter que ce soit présenté comme ça, car nécessairement ça éloigne pas mal de gens qui, sans pour autant essayer, auraient pu au moins comprendre, banaliser et accepter ce choix comme légitime et absolument pas radical. Et je ne parle même pas de la confusion soigneusement entretenue entre végétarisme et végétalisme (ce qui, comme tout choix plus prononcé, implique de vraies reconfigurations du mode de vie, alimentaire ou non, sans que ça en fasse un enfermement sectaire et une vie tristoune pour autant).
En vivant un végétarisme ouvert, non dogmatique, heureux dans ses baskets (ou ses doc marten's), j'ai pu voir à quel point l'entourage, quand il n'est pas pétri de préjugés inattaquables, peut finalement comprendre et accueillir avec beaucoup de respect et d'intelligence ce choix. C'est parfois même surprenant, alors que le but n'est pas de juger les autres ou de faire du prosélytisme, de voir comment l'exemple tranquille qu'on montre peut influer à moyen ou long terme la vie des autres. Certains de mes amis sont devenus végétariens, d'autres ont simplement changé leurs habitudes alimentaires, en les repensant de manière plus cohérente. D'autres, sans aller jusque là, on pleinement compris de quoi il s'agissait. La meilleure preuve qu'on puisse avoir que c'est compris et banalisé plutôt que considéré comme une différence excluante ou méprisée, c'est qu'on n'en parle plus. Quand on mange ensemble, les habitudes sont prises et le respect prévaut. Et chacun sait que ce n'est pas plus compliqué que ça à vivre. On n'en parle pas, pas parce qu'on m'ignore ou qu'on ne me fait pas de place, mais parce qu'elle est admise comme légitime et tout à fait normale.

Après, il y a des gens que la banalisation n'intéresse pas et qui tiennent à leur marginalisation. J'en parlerai une autre fois...

En attendant... bon appétit !

Publicité
Commentaires
Z
Très bel article. Je vous en remercie, c'est un plaisir de vous lire en grignotant mon repas du midi (végé). Je suis on ne peut plus d'accord avec vous, un bon exemple, un peu d'humour, de bons petits plats et cet exemple tranquille peut avoir plus de répercussions que prévu! Moi, c'est ainsi que j'ai été convaincue: une amie végétarienne qui mangeait fréquemment chez moi (elle aimait ma cuisine et ma compagnie), je ne lui ai jamais posé la question pour ne pas l'embarrasser, elle n'en a jamais parlé. J'aimais cuire végé quand elle était là (tous les deux jours) et je me suis penchée sur la question...et doucement je suis devenue végétarienne. Comme quoi! Des fois, le silence est d'or!
Répondre
Publicité
Publicité