R. L. Burnside
RL Burnside est mort. Ben oui, ça y
est. Depuis quelques mois, déjà,
en fait. Il fallait bien que ça arrive, quand même, à force de traîner
ses guètres de bluesman teigneux, pas fréquentable, jusqu'à plus de 75
ans et pas mal de bouteilles de bourbon, on ne pouvait pas s'en sortir
indéfiniment par une pirouette et quelques vannes salaces. Eh ben ça y
est, elle est cassée, sa pipe. Affaires classées, rayon histoire du
blues et des âmes griffées.
A tous ceux qui considèrent, non sans raisons, que le blues est
avant tout une musique qui ronronne, toujours pareille, balisée,
banalisée, prévisible, avec des soli de guitares dégoulinants et
insipides, sans âme et avec à pein un peu de swing, une musique de
geignards pour les geignards, à ceux là je ne saurai trop recommander
d'aller se mettre les oreilles à portée des chansons de ce bonhomme là.
Dans la lignée d'un John Lee Hooker, Rural L Burnside a toujours pratiqué cette
musique rèche et sans fioritures, sur l'os, qui caractérise le country
blues des débuts, qu'il soit électrique ou acoustique. Comme Skip
James, Mississipi John Hurt, Bukkha White (voire Lightnin' Hopkins) et
tant d'autres artistes, des années 1930 à maintenant, il n'a pas changé
de cap, maintenant une formule dénuée de tout superflu cosmétique,
sachant que la simplicité et le fait de jouer toujours sur les mêmes
accords n'impliquent pas de se répéter.
J'ai
découvert le bonhomme tardivement, après qu'il aie été remis sur le
devant de la scène (enfin, tout est relatif) par Jon Spencer. Le
premier disque que j'ai acheté de lui, c'est un live et à mon avis
c'est celui par lequel il faut le découvrir. Burnside on Burnside est
en effet très caractéristique du bonhomme : 3 types sur scène,
batterie, guitare et lui à la guitare et au chant, même pas de basse,
surtout pas de clavier, et le groove prend pourtant de façon imparable,
sec comme un coup de trique.
Il y en a deux autres
dont je peux parler parce que je les ai, le reste de sa discographie,
on va la chercher si on aime ce qu'on a goûté.d'abord les First Recordings, qui datent de 1960 je
crois, histoire de voir d'où vient ce sale gars. Tout y est déjà, un
peu, mine de rien. A l'autre extrémité, son dernier disque, Wish i was in heaven sitting down,
où
le- gars- dont- on- n'attendait- plus- rien- tellement- c'était- déjà- bien- d'avoir- fait- tout- ça, se paie le culot d'innover de façon plus que convaincante, en
incorporant à sa musique les boucles et les samples de dj débridés.
Le groove y est, c'est assez terrible et ça n'a rien du collage
artificiel et décoratif qu'on pourrait attendre. Jusqu'à sa mort, sans rendre de compte à personne,
RL Burnside aura mené sa barque, ressassant ses rengaines ou inventant,
à prendre ou à laisser. A fréquenter, de toutes façons.
Radio kipik: le titre Rollin' & Tumblin'
de Burnside on Burnside devrait être mis en ligne ce week-end,
peut-être suivi, qui sait, d'un ou deux morceaux extraits d'autres
albums...