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la tanière du hérisson
7 septembre 2006

Souriez, vous êtes filmés, fichés, fliqués

Allez, ça y est. Ouf. G.W. Bush a "avoué", "reconnu" l'existence des prisons secrètes de la CIA. La belle affaire. Rappelons que ces prisons, dont personne du reste n'avait attendu la parole présidentielle pour apprendre le fonctionnement, sont des centres de détention situés hors du sol des Etats-Unis (donc dans d'autres pays, cqfd), pas du tout officiels, où sont incarcérés et "interrogés" des individus soupçonnés de terrorisme, par exemple (au hasard). Que la CIA s'accommode de telles pratiques, et prenne des libertés avec celles du  péquin lambda en toute impunité, ça fait des décennies que tout le monde le sait. Que des Etats supposés souverains admettent que, sur leur sol, une puissance étrangère installe ce genre de lieux en toute discrétion et au mépris des droits les plus élémentaires, on est en droit de le déplorer. Le pire, malgré tout, je trouve, c'est la facilité avec laquelle, désormais, on avoue tout ça publiquement en justifiant l'inadmissible. Pas avec décontraction, quand même, mais visiblement avec l'applomb de quelqu'un qui sait que ça n'étonne ni ne choque plus grand monde.
    Depuis le 11 septembre, c'est bien connu, le mot "terroriste" justifie tout. Même le coup de boule de Zizou semblait légitime puisqu'on le disait (à tort) traité de "musulman terroriste" par l'Italien félon. Mais de l'anecdote au drame généralisé il n'y a qu'un pas. La persistence d'une centre pénitentiaire comme Guantanamo sur le sol cubain est déjà en soi un scandale dont la durée ne fait qu'accroître le caractère insupportable. Le génocide perpétré en Tchétchénie en toute impunité par les Russes ne saurait être justifié par la simple menace terroriste tchétchène (réelle, du reste). Le Patriot Act qui empiète en toute bonne conscience sur les droits des citoyens américains (du moins ceux qui ne sont pas au-dessus des lois) est un exemple des remises en cause des fondements les plus élémentaires des droits de l'Homme. Et les Américains, s'ils sont en pointe dans ce domaine parmi les démocraties occidentales, n'en ont pas l'apanage.
Les Anglais, eux, avaient déjà choisi leur camp en permettant aux Américains d'établir sur leur sol un pied à terre européen de leur réseau d'espionnage électronique Echelon (merci la perfide Albion, once again). Les Anglais, donc, s'apprêtent cette fois à entrer dans une ère nouvelle. Le gouvernement Blair compte bien instaurer un système de fichage des femmes enceintes issues de milieux très défavorisés sous le prétexte de leur fournir (sans leur en laisser le choix) un encadrement et des aides destinées à éviter à leur progéniture de sombrer dans la délinquance. Là encore, flicage, mise en fiches, avec comme mise en correspondance [milieux défavorisés = délinquance inéluctable].
Un article récent de Libé faisait état des déclarations d'experts français en matière de Défense et de terrorisme, selon lesquels  la période à venir allait être pour la France placée sous le signe de risques très sérieux d'attentats, étant donné la situation au Moyen-Orient et au Maghreb mais aussi de par l'échéance électorale de 2007, propice à des actions "spectaculaires" (comprendre "particulièrement meurtrières", j'imagine). Voila qui encouragera nos dirigeants à, eux aussi, promulguer des lois passant outre les droits individuels au profit d'intérêts collectifs prétendument supérieurs ou urgents. La question n'est d'ailleurs pas de savoir si c'est une bonne chose ou un scandale.
Il faut juste voir les choses en face. De plus en plus ouvertement, des dirigeants ou élus de stature nationale ou internationale estiment, à la suite de je ne sais qui aux Etats-Unis (peut-être Donald Rumsfled, je ne sais plus), que les droits de l'Homme, jadis jugés universels, avaient été conçu "au cours et pour une autre époque". L'ère des conflits globaux dépassant les clivages de frontière et de nationalité (cf. La guerre du Hezbollah contre Israël au Liban) pose le problème d'une réponse appropriée qui engage sur le terrain des libertés individuelles. Mais la remise en cause de ces dernières ouvre très certainement la voie aux pires dérives, dans des domaines qui n'ont rien à voir avec la lutte contre le terrorisme, la délinquance ou je ne sais quelle menace. Il ne faut pas se leurrer, d'ailleurs, sur le fait que ce renoncement aux droits garantis par la loi n'inquiètera que ceux qui ne sont pas au-dessus desdites lois.
Le flicage mondialisé et banalisé s'affiche désormais avec de plus en plus d'aisance, et nous allons tous en bénéficier ou en faire les frais, tout en bloc sans distinction. C'est commode, cette confusion des genres, mais c'est sans doute fait pour.

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Commentaires
A
Ben normal, c'est tellement plus simple pour eux de se cacher derrière l'idée qu'aujourd'hui nous ne vivons plus les conflits internationaux comme avant.<br /> Comme si la menace l'emportait sur tout le reste et que de toute façon, à l'heure actuelle, nous vivons dans une ère de guerres asymetriques (ce n'est plus un pays qui se bat contre un autre mais plein de soi-disant "ennemis" qui peuvent te sauter à la gueule de tous les cotés et n'importe quand). Et dans la mesure où on peut pas foutre un flic derrière chaque connard qui se balade avec une bombe (ou un sac Gucci) et ben ça justifie beaucoup de choses pour eux...<br /> Bref, c'est pas faux mais c'est quand même pas un light, nan ?
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